Résumés des projets financés CESSUR

Approche expérimentale pour déterminer l’impact de la réactivité des fluides et de la perméabilité des roches sur la propagation des fronts de dolomitisation hydrothermale. – BEAUDOIN Nicolas

La majorité des gisements de Zn et Pb se trouvent dans des dolomites (CaMg(CO3)2) hydrothermales (Mississippian Valley Type deposits), issues d’une substitution Ca – Mg dans du carbonate de calcium (CaCO3). Les paramètres qui contrôlent la propagation de la dolomitisation hydrothermale sur les grands volumes observés, et par conséquent la distribution des gisements associés, restent mal compris. Néanmoins, des travaux en cours montrent que les fronts de dolomitisation hydrothermale naturels sont caractérisés par des motifs physiques (rugosité, distribution de la dolomite dans la calcite hôte) soient des témoins directs des conditions de transports des fluides réactifs (advection et diffusion), et des conditions pétrophysiques de la roche hôte (perméabilité). Ces récentes découvertes ouvrent de nombreuses voies de recherches pour mieux comprendre le phénomène de dolomitisation, la façon dont il se propage, impactant de fait notre compréhension de la distribution des métaux bases dans la couverture sédimentaire. Nous proposons de reproduire les motifs observés dans la nature a l’échelle des cristaux par une approche expérimentale 4D en milieu contrôlé afin de comprendre les principaux paramètres contrôlant la distribution de la dolomitisation hydrothermale. En effet, de récents résultats publiés montrent qu’il est possible de dolomitiser de la calcite pure sur une durée de 24h dans des conditions de pression (pression de vapeur 16 bars) et de température (200°C) reproductibles en laboratoire. Ce projet se base sur (1) la publication récente de protocoles permettant la dolomitisation en laboratoire à 200 °C en 48h, testés à l’UPPA sur un réacteur ex-situ dédié (LaTEP); (2) les récents développements en imagerie 4D fait à l’UPPA (DMEX), notamment via l’embauche d’un ingénieur recherche dédié au développement de réacteurs adaptés aux tomographes à rayons X (xCT) ; et (3) sur les récentes travaux de N. Beaudoin et S. Centrella (LFCR), caractérisant les fronts de dolomitisation hydrothermale de deux chantiers cibles complémentaires: les chainons béarnais (Pyrénées) et du bassin de Maëstrat (Espagne). Nous proposons de tester le rôle de la réactivité chimique du fluide dolomitisant sur l’expression du front se développant dans des échantillons mono- et poly-cristallins. La réaction sera étalonnée dans le réacteur ex-situ pour chaque expérience, ce qui permettra d’observer le front de dolomitisation. Ces expériences seront répétées dans une cellule in situ développée spécialement pour la xCT, permettant de reconstruire les volumes de différentes phases à différents moments de la réaction pour caractériser l’évolution des fronts et des motifs associés (porosité, rugosité des contacts).Ce travail expérimental sera effectué en grande partie par un(e) jeune chercheur(se), en contrat post doctoral dont le financement est assuré pour 18 mois à partir de janvier 2021 (co-financement communauté de communes Lacq-Orthez et E2S). L’année 1 sera dédiée au développement interne de la cellule pour la xCT et à l’expérience 4D sur un monocristal de calcite pure (12500€ de fonctionnement). L’année 2 sera dédiée aux expériences sur deux échantillons polycristallins et à la diffusion des résultats (12200€ de fonctionnement). Les résultats attendus permettront de mieux comprendre la propagation de la dolomitisation hydrothermale liée aux dépôts de minerais bases.

Impact de la Transition Énergétique sur les Matières premières– Clément BONNET

Cette candidature à l’appel d’offre du programme TelluS-CESSUR répond à deux objectifs. D’une part, elle vise à obtenir des fonds pour financer l’acquisition d’une base de données nécessaires à la conduite d’un travail empirique sur les interactions entre les ressources en matières premières, la transition énergétique et le développement des technologies bas-carbone. D’autre part, elle aidera au financement de l’organisation d’un colloque interdisciplinaire visant à rendre compte de l’état de la recherche sur les liens entre la transition énergétique et les ressources en matières premières, et à mettre en relation les chercheurs de ce domaine en vue d’amorcer des collaborations à plus long terme. L’objet du projet de recherche est de conduire une analyse empirique, via l’utilisation de méthodes économétriques, de l’impact de la transition énergétique sur l’extraction et la consommation de matières premières en tenant compte du niveau de développement technologique des techniques de génération d’électricité bas-carbone. Cette étude se fondera sur l’utilisation des données de consommations de matières premières (directes et indirectes) d’un panel de pays développés et évaluera dans quelle mesure celles-ci ont été affectées par la diffusion des technologies bas carbone (mesurée en unité de capacité installée) et leur niveau de développement technique (mesurée à l’aide d’indices construits sur la base des données de brevets). Elle abordera donc cette question sous un angle méthodologique originale et viendra ainsi compléter les analyses de cycles de vie et celles fondées sur la modélisation prospective – deux approches largement utilisées dans la littérature. Les frais courants (A) visent à couvrir les déplacements des deux chercheurs participant à ce projet, Florian Fizaine (Université Savoie Mont Blanc) et Clément Bonnet (Université Montpellier), en vue de travailler ensemble et de venir présenter leurs travaux dans leurs laboratoires respectifs. Les dépenses d’équipements (B) concernent l’acquisition de la base de données PATSTAT Online pour une durée de deux semestres (qui ne se suivent pas nécessairement).Les frais de missions, déplacements, colloques et communication (C) couvriront, d’une part, deux participations aux conférences annuelles de l’association française des économistes de l’environnement et des ressources naturelles (FAERE) et, d’autre part, l’organisation d’un colloque interdisciplinaire sur le thème des interactions entre la transition énergétique et les matières premières.

Production de volatils (H2, CH4) et mobilisation de métaux pendant la serpentinisation du manteau aux zones de divergence lithosphérique- BOULVAIS Philippe

L’exhumation du manteau par le jeu de détachements dans les marges très étendues s’accompagne d’une serpentinisation pervasive par interaction entre l’eau de mer et les péridotites. Ces interactions fluides-roches sont à l’origine de la formation de ressources minérales (dont les minéralisations sulfurées et oxydées sur substrat ultramafique en sont une expression ; e.g. Fouquet et al., 2010) et de ressources gazeuses énergétiques (production de di-hydrogène, H2, et de méthane, CH4 ; e.g. Charlou et al., 2002). Sur le site fossile de Tasna (Alpes centrales, Suisse), analogue terrestre exceptionnel des marges passives aujourd’hui au large des côtes ayant fonctionné au Jurassique, nous proposons l’étude des mécanismes de production et de circulation de sous-produits de la serpentinisation (volatils et métaux), depuis des zones profondes, non totalement exhumées (sous le Moho tectonique), vers des zones proches du plancher océanique, où les fluides hydrothermaux, après avoir serpentinisé les péridotites, se mélangent avec des eaux marines. L’analyse géochimique (élémentaire et isotopique) et celle des inclusions fluides seront centrées sur la calcite, minéral ubiquiste précipité le long de la surface de détachement, et se feront sous contrôle d’une caractérisation minéralogique et structurale. Des avancées sur la compréhension du statut des fluides et des métaux dans les marges passives sont attendues.

Ripen the fused silica capillary capsule (FSCC) technique: precise controls on pressure (P), volume (V), composition (X) and thermal expansion (α)– CAUMON Marie-Camille

Hydrothermal experiments are the major sources of knowledge for understanding physical and chemical processes linked to metal and energy resources in the Earth’s crust. In comparison with conventional techniques such as autoclaves, the fused silica capillary capsule (FSCC) offers unprecedented advantages of real-time microscopic observation and spectroscopic analyses. Since its systematic introduction in 2008, FSCC has been widely used, however, its powerfulness and reliability are dramatically impeded by a dearth of precise knowledge of thermal expansion and a lack of accurate controls on pressure, volume, and composition of loaded materials. In this proposal, four work packages are planned to mitigate and eliminate these impedances. Thermal expansion will be quantified through a series of comparative experiments utilizing anhydrite Raman – thermobarometer, equations of state, and microthermometry. New mineral Raman-barometers will be calibrated as pressure sensors for FSCC by using high – pressure optical cell (HPOC) – Raman spectroscopy. Two sets of micro-sealing apparatus will be explored for precise volume control. A mixing-injection technique will be evaluated for quantitative loading of liquid and solid. The first two work packages are considered practical and low-risk, whereas the latter two are reckoned as exploratory and high-risk. This project will ripen the FSCC technique, and make it a precise and reliable experimental platform for various geological and chemical applications.

W : Age et Traçage Isotopique des Sources des Indices du Tarn– ESTRADE Guillaume

Le tungstène (W, de l’allemand Wolfram) est un métal très dur, dense et réfractaire, utilisé surtout sous forme de carbure et d’aciers spéciaux, pour des outils de coupe et d’usinage et des pièces résistantes à la chaleur. Ce métal est aujourd’hui incontournable pour de nombreuses applications industrielles européennes, notamment dans les domaines de l’aéronautique (aubes de turbines des moteurs d’avion), de l’énergie (machines-outils destinées à la fabrication de centrales et générateurs) et de l’armement (blindages). La consommation mondiale en 2019 était estimée à environ 85 kt de W provenant à plus de 80% de gisements situés en Chine. En 2017, la commission européenne a classé le W parmi les matières premières critiques qui présentent un risque à la fois en termes d’approvisionnement et de vulnérabilité pour l’industrie des hautes technologies. La France possède de nombreux gîtes de W, principalement dans le Massif Central Français (MCF) et les Pyrénées mais la dernière mine de W (Salau, Pyrénées) a fermé en 1986. Les ressources françaises en W ont connu un regain d’intérêt depuis 2012, impulsé par une prise de conscience des dirigeants de la vulnérabilité de la France et de l’Europe face à l’approvisionnement en W. Les gisements de W actuellement exploités dans le monde sont de 2 types : (1) des systèmes filoniens hydrothermaux péri-granitiques où le W est porté par la wolframite, un tungstate de fer et manganèse ((Fe,Mn)WO4), (2) des skarns à scheelite, un tungstate de calcium (CaWO4), généralement formés par métamorphisme de contact d’un granite avec un encaissant carbonaté. Il existe un troisième type de minéralisation appelé minéralisations stratoïdes à scheelite disséminée. Ces 3 types de minéralisations ont été décrits en France, notamment dans le Massif Armoricain, le MCF et les Pyrénées. Les travaux menés par le BRGM, en particulier lors de l’inventaire minier des années 70-80 ont contribué à mieux connaître ces systèmes et à proposer les premiers modèles de formation. Les progrès analytiques réalisés ces 20 dernières années, tel que le développement des analyses élémentaires et isotopiques in-situ, apportent un nouvel éclairage sur l’origine des gisements de métaux. En s’appuyant sur ces méthodes d’analyse modernes, plusieurs études récentes ont été menées sur les minéralisations en W de la chaine Varisque européenne, notamment sur le gisement de Panasqueira au Portugal et les gîtes et gisements Français du MCF et des Pyrénées. Les résultats obtenus ont permis d’affiner, parfois de bouleverser, les modèles métallogéniques existants ; par exemple, en France, les méthodes de datation U-Pb in-situ sur wolframite ont montré que les minéralisations des systèmes filoniens hydrothermaux péri-granitiques du MCF se sont formées sur un intervalle de 40 Ma dans des contextes géodynamiques différents liés à l’orogénèse Varisque. Dans les Pyrénées, les âges obtenus par datation in-situ sur scheelite et apatite du gisement de W de Salau (type skarn) ont permis d’établir un nouveau modèle métallogénique pour ce gisement de classe mondiale en montrant qu’il existait deux générations de scheelite séparées par un intervalle de quelques millions d’années. D’autres gisements ont fait l’objet d’études détaillées et ont permis d’apporter de nouvelles données sur l’origine et les mécanismes de dépôt du W, en particulier les gisements de Puy-les -Vignes et Echassières. Dans le sud du MCF, le district à W de Fumade-Montredon-Labessonnié est resté relativement peu étudié depuis la fin de l’inventaire minier national. A l’exception d’une datation U-Pb sur wolframite du gisement de Montredon-Labessonnié, aucune nouvelle donnée n’a été acquise pour mettre à jour le modèle métallogénique de ce district. L’objectif du travail proposé ici, consiste à appliquer des méthodes d’analyses modernes (datations U-Pb in-situ, analyses des éléments majeurs et traces des principaux minéraux, analyses des inclusions fluides in-situ et analyses isotopiques du W) sur le district à W de Fumade-Montredon-Labessonnié qui regroupe dans un territoire restreint un grand nombre d’indices, de gîtes et de gisements de W de différentes natures.

Développement de méthodes d’investigation et étude du couplage hydro-mécanique et de la sismicité induite pour la géothermie moyenne enthalpie-GOT Jean-Luc

Ce projet a pour objectif le développement de méthodes pour estimer les ressources, les paramètres hydro-dynamiques et le risque de sismicité induite, ainsi que pour étudier le couplage hydro-mécanique, dans le cadre de projets géothermiques moyenne enthalpie. Il utilise des données sismiques passives acquises en continu (5 stations RAP, Annecy, depuis 2012), pour détecter la sismicité et estimer les variations temporelles de vitesses sismiques par corrélation de bruit, et des données magnéto-telluriques (MT ; en 2020, 15 sites sur Annecy), pour estimer la résistivité à des profondeurs kilométriques. Une première analyse du bruit sismique montre clairement des variations de vitesses saisonnières pendant les 8 années d’enregistrement, jusqu’à des fréquences de 0,5 Hz. Ces variations sont fortement corrélées à courte période avec les précipitations, et à longue période (année) avec les températures (contrôle de l’infiltration par l’évapo-transpiration). Les vitesses sont moins élevées entre Janvier et Juillet lorsque l’infiltration, et donc le volume et la pression de l’eau sont plus forts; la sismicité est aussi clairement plus forte pendant cette période. Le site d’Annecy est un véritable laboratoire naturel où la fracturation hydraulique d’un aquifère se réalise périodiquement, ce qui facilite son étude. Il se prête bien à l’élargissement du projet à d’autres équipes (Nice, hydro-mécanique ; Strasbourg, EM-MT) et valorise les données du TGIR RAP.    L’acquisition de données MT sur ~15 sites a permis de calculer la résistivité apparente à l’aide de la méthode de Herring et Junge (2019, code FFMT) jusqu’à une fréquence comprise entre 1 et 5 Hz – une performance en milieu péri-urbain. Les modèles de résistivité 1D ont été calculés pour chaque site et montrent des résistivités inférieures à 50 Ohm.m à 2km de profondeur. Dans un premier temps un modèle 3D du tenseur des phases a été obtenu à l’aide du code ModEM, l’inversion 3D de l’impédance n’étant pas possible sans corrections statiques.   La demande concerne la continuation de ce projet ; nous projetons de réaliser : –       le doublement du nombre de sites MT, l’ajout de capteurs LEMI pour augmenter la profondeur d’investigation ; la réalisation des corrections statiques par TDEM pour obtenir un modèle 3D de l’impédance; –       la construction d’une courbe de dispersion des variations de vitesse sismiques en fonction de la fréquence, et son inversion pour trouver le modèle 1D de variation relative de vitesse en fonction de la profondeur ; –       l’inversion jointe probabiliste de la variation de vitesse sismique et de la résistivité apparente pour trouver un modèle 1D de la teneur en eau (produit porosité*saturation) en fonction de la profondeur;   –       la modélisation de la relation entre variations de vitesse, températures et précipitations ; –       l’estimation des variations de pression hydraulique (dont celle nécessaire pour déclencher la sismicité), puis de la transmissivité et du coefficient d’emmagasinement. La demande financière concerne : –       l’achat de 24 électrodes impolarisables Phoenix (5 k€) ;  –       les assurances MT (2 k€) et LEMI (1 k€) ; –       le transport du matériel prêté (LEMI (DIAS Dublin), TDEM (OPGC) : 1,5 k€) ; –       les missions de terrain (3 k€), en Europe pour collaboration (3 k€), pour colloques (3 k€) ; –       la valorisation des résultats (publications : 3 k€) ; –       l’achat d’un logiciel géomodeleur (3 k€).

Importance des interactions eau-métaux-hydrocarbures dans la compréhension des gisements métallifères et des systèmes pétroliers– MICHELS Raymond

Dans de nombreux gisements pétroliers ainsi que dans les gisements métalliques, l’association matière organique et métaux est fréquemment observée. Le traçage élémentaire des métaux dans les huiles est une thématique qui a été abordée par l’étude de l’origine des pétroles ou de leurs caractéristiques globales (teneurs en Ni et V) et reste une thématique importante dans le domaine analytique en relation avec la pétrochimie (respect des normes environnementales). La perspective de dater l’âge absolu du pétrole par des méthodes isotopiques appliquées aux métaux a focalisé l’attention de la communauté des géochimistes sur les couples rhénium-osmium et uranium-plomb. Cependant, dans le cadre de la formation de gisements métallifères, certains articles soulèvent la possibilité que le pétrole soit vecteur significatif dans le transport des éléments métalliques comme l’or (Crede et al., 2019) ou le platine (Sanz-Robinson, 2020). Cependant, la consultation de la littérature révèle que très peu d’éléments de compréhension des interactions entre une phase aqueuse porteuse de métaux et un pétrole aux conditions géologiques ont été publiés. Par exemple, il n’y a pas de données disponibles sur le partage des métaux entre phase aqueuse et pétrole, ni d’information sur les processus en jeu lors des interactions entre un système multiphasique à double solvant (aqueux et organique). La variabilité de la nature, distribution et teneurs en métaux dans les pétroles ne s’inscrit donc pas aujourd’hui dans un cadre théorique des interactions fluides-roches-hydrocarbures.Ce projet de recherche a ainsi pour objectif d’étudier les relations métaux-eau-pétrole (METEAUPETROL) dans les inclusions fluides (les seuls échantillons de paléofluides susceptibles d’être à l’équilibre et exempts de toute contamination métallique) et à travers une campagne expérimentale de mesure du partage des métaux entre les deux phases. Les mesures sur inclusions se baseront sur la technique d’ablation laser ICPMS. Cette dernière sera appliquée à des inclusions fluides naturelles pour identifier nature des métaux, teneurs et conditions de piégeage. Ces données serviront ensuite à définir les conditions expérimentales d’interactions entre une phase aqueuse chargée en métaux et un pétrole. Les expériences seront conduites en réacteurs batch ainsi qu’en micro-capillaires (ces dernières ont l’avantage de pouvoir être directement analysées sous LA-ICPMS sans aucune manipulation des fluides).L’ensemble des résultats conduira à mieux cerner la nature des métaux, leurs concentrations dans les pétroles, leur partage entre phase aqueuse et hydrocarbonée dans divers contexte de gisements métallifères et pétroliers. Ce seront les premières données quantitatives de ce type acquises de façon systématique. L’ensemble de la recherche permettra d’améliorer notre compréhension des interactions eau-roche-hydrocarbures et de progresser dans l’intégration de la réactivité de la matière organique dans le corpus théorique des systèmes fluides-roche. La durée du projet proposé est de deux ans. Il s’inscrit dans le cadre de la thèse de Nanor Arabian (bourse MERSR 2020-2023) avec l’implication de deux CR et deux ingénieures pour un total de 24 homme/mois et une demande de budgétaire de 14370 euros.

La datation des argiles : un outil pour l’étude des systèmes géothermiques– MUNCH Philippe

Cette étude vise à développer des outils géochronologiques qui permettent de suivre précisément dans le temps l’évolution des minéraux argileux dans les systèmes géothermiques : – La datation des illites et I/S en 40Ar/39Ar, tant sur la préparation des échantillons (encapsulation), que sur l’interprétation des spectres d’âges en fonction des effets du recul lors de l’irradiation, de la taille des cristallites, des mélanges et des polyphasages (âge plateau/âge total).  – La datation des illites et des kaolinites par RPE pour des domaines de stabilité de plus haute température que la surface terrestre. Ces outils géochronologiques permettront d’établir des reconstitutions de schémas spatio-temporels de l’évolution thermique des systèmes géothermiques étudiés. Couplés à l’analyse minéralogique fine ils permettront de caractériser le type de régime responsable de la genèse des systèmes hydrothermaux étudiés, mais également les interactions fluide/roche et leurs impacts sur le colmatage des drains. La précision de la technique 40Ar/39Ar permettra de préciser l’évolution temporelle de ces systèmes dont la durée est courte, globalement < 1 Ma. Les outils géochronologiques pourront ensuite être appliqués à des contextes différents aboutissant à la néoformation de phases argileuses et bénéficieront à une large communauté. La meilleure connaissance du fonctionnement des systèmes géothermiques étudiés bénéficiera à l’exploration de nouvelles ressources géothermiques sur le territoire national ainsi qu’à leur exploitation.

Mesure des solubilités des oxydes de soufre et d’azote dans les systèmes eau-gaz-sels à haute pression et haute température par micro-spectrométrie Raman et simulation moléculaire. Application au stockage des gaz acides– STERPENICH Jérôme

Les données cinétiques et thermodynamiques sur les systèmes eau-gaz-sels demeurent parcellaires voire inexistantes, particulièrement sur les systèmes soufrés et azotés à haute pression et haute température, et ce malgré des avancées significatives ces dernières années, tant expérimentalement qu’en modélisation. Ces données sont pourtant nécessaires pour alimenter les modèles utilisés pour décrire, comprendre et prédire l’évolution de la majorité des systèmes terrestres. L’objectif de ce projet, dans la continuité du projet Tellus financé en 2019 sur cette thématique (Porteur J. Sterpenich) est de renforcer l’acquisition de nouvelles données thermodynamiques et cinétiques sur les systèmes H2O/(SOx-NOx)/sels portés à haute pression (jusqu’à 600 bar) et haute température (jusqu’à 600°C). Ce projet, soutenu par une allocation de thèse sur la période 2019-2022 (Doctorante Khouloud Saadallah) fait appel aux compétences sur les gaz dangereux et leur analyse développées par le laboratoire GeoRessources et à l’expérience et aux compétences d’IFPEN en simulation moléculaire. Des données Raman seront acquises sur les systèmes SO2/H2O/NaCl et NO/H2O/NaCl en fonction de la pression, de la température et de la composition chimique du système par couplage avec une platine microthermométrique et des réacteurs microcapillaires. Des données thermodynamiques de référence seront calculées par simulation moléculaire afin de calibrer la réponse Raman à certains points PTX cruciaux. Enfin, ce projet voit également démarrer une nouvelle collaboration avec le LRGP (Nancy) sur le développement d’équations d’état et la détermination des enveloppes de phases de ces systèmes complexes.

Pressions de fluides à l’interface socle-couverture, conséquences structurales et géométrie de gisements– STRZERZYNSKI Pierre

Dans de nombreux bassins, l’interface socle/couverture est le siège de circulations de fluides intenses à l’origine de nombreux gisements (U, Pb, Zn, F et Ba) d’importance économique. Ces zones sont un lieu d’interactions et de mélanges de fluides de natures et d’origines différentes : diagénétiques, météoritiques, fluides hydrothermaux profonds… Concentrées dans les premiers mètres de sédiments, les minéralisations peuvent parfois se retrouver bien plus hautes dans la série sédimentaire, souvent en association avec des processus de fracturation assistés ou non par de fortes pressions de fluide. L’état de surpression des fluides peut par exemple être associé à une migration généralisée des fluides diagénétiques depuis le centre du bassin vers ses bordures ou à l’arrivée localisée de fluides hydrothermaux chauds remontées à la faveur de failles de socles activées en contexte extensif. Facilitant la fracturation et le drainage des fluides, ces pressions pourraient donc être un paramètre de contrôle important de la distribution latérale et verticale des minéralisations et de la géométrie des gisements. La partie nord du bassin Aquitain présente des gisements de fluorine et de barytine qui ont déjà été exploités. Leur formation est datée du Jurassique et précède la phase principale d’ouverture datée de l’Albien. Partout, les minéralisations sont localisées dans les premiers mètres de la série sédimentaire à l’exception du littoral Vendéen où l’on les retrouve une centaine de mètres plus haut. Sur ces sites, nos observations (Strzerzynski et al., 2020) ont mis à jour que les minéralisations remplissent des failles normales, des veines verticales et horizontales et des brèches hydrauliques. Certaines de ces structures indiquent que les fluides étaient sous forte pression au moment de la rupture de la couverture et des résultats préliminaires suggèrent que ces pressions s’équilibreraient avec une source située à plusieurs kilomètres de profondeur dans la croûte. Deux axes de recherches sont proposés dans le cadre de ce projet : 1) Caractériser les fluides mis en jeu et tracer les sources des éléments : L’observation fine des relations paragénétiques entre minéralisations et structures a permis de déterminer quelles phases cristallisent au moment de la rupture. L’application de méthodes microthermométriques et géochimique sur ces minéraux doit permettre de mieux contraindre les propriétés physiques et chimiques du fluide au moment de la rupture. Ceci doit permettre d’une part de tracer les sources des différents éléments et de déterminer le gradient géothermique avant la phase de rifiting principale. 2) Evaluer les modalités de la circulation des fluides (circulation diffuse,localisée dans des fractures) à l’interface socle couverture en déterminant les conséquences mécaniques (changements de contraintes) et structurales (fracturation) de la remontée localisée de fluides sous différents régimes de pression. Ce travail, en lien avec les observations de terrain, se fera via de la modélisation expérimentale couplée à des simulations numériques ; l’objectif étant de mieux les géométries des gisements.

Déchargement de faille par pompage cyclique et applications géothermiques– TOUSSAINT Pierre

L’exploitation anthropique du sous-sol est un enjeu majeur, tant économiquement que du point de vue du développement durable. Que ce soit pour stocker des ressources liquides ou gazeuses, pour séquestrer des gaz à effet de serre, ou pour améliorer la perméabilité d’échangeurs géothermiques, elle implique souvent d’injecter et extraire des fluides. Ces injections et extractions peuvent provoquer dans de nombreux contextes tectoniques une sismicité induite, et/ou une sismicité déclenchée sur des failles éloignées des puits mais mécaniquement chargées proche de seuils critique. Par exemple, des questions se posent lorsqu’une crise sismique a lieu dans une région où a lieu la stimulation d’un échangeur géothermique, ou lorsque les conditions d’exploitation d’un réservoir ou un puits doivent être définies en s’assurant de minimiser la sismicité déclenchée. La prise en compte de la diffusion de surpression ou dépression créée par un pompage permet de calculer l’évolution de la contrainte effective sur les failles identifiées, et évaluer l’évolution de l’aléa sismique. On s’intéressera dans ce projet à deux volets : la manière dont une injection en puits peut ou non provoquer une crise sismique sur une faille mécaniquement chargée, ou la manière dont on peut contrôler des cycles d’injection et extraction pour décharger mécaniquement une faille de manière asismique. Ceci sera fait à l’aide de codes numériques de modèles poroélastiques couplés à une loi de friction sur les failles. Le modèle numérique sera calibré par comparaison avec des expériences de laboratoire sur des milieux poreux chargés mécaniquement, soumis à des cycles d’injection et extraction. Une fois le modèle validé et les paramètres de ce modèle calibré, il sera mis à l’échelle et utilisé sur des situations réalistes à l’échelle plurikilométrique, et confronté à des données acquises durant des crises de sismicité induite et déclenchée. Lors des expériences de laboratoire, on suivra les déformations à l’aide de caméra rapide en milieu transparent (cellule de Hele-Shaw) chargée sous cisaillement, par traitement numérique et suivi de particules. Les données microsismiques seront enregistrées à l’aide d’une chaine d’acquisition numérique et d’antennes d’accéléromètres de choc. Les cycles d’injection et extraction devraient pouvoir permettre de stabiliser l’interface glissante en augmentant la contrainte effective normale en extrayant tout d’abord du fluide, puis de déclencher le glissement en injectant du fluide dans la zone globalement stabilisée en champ lointain par la diffusion de la précédente baisse de pression de pore créée. On explorera systématiquement les paramètres de perméabilité, charge cisaillante et charge normale, amplitude et période des cycles d’injection et extraction. Les résultats seront comparés aux codes couplés de poroélasticité / friction déjà développés par l’équipe proposante. Ces codes seront ensuite utilisés sur cas réels, notamment sur la région autour de Strasbourg où des crises de sismicité et de la stimulation géothermique ont eu lieu fin 2019, ainsi que sur des données bien documentées, étudiées et connues de par le monde, telles que la sismicité induite dans l’Oklahoma, USA.

Rôle de la déformation et du métamorphisme tardi-orogénique dans la genèse des gisements de tungstène stratiformes. Vers une amélioration du modèle métallogénique.– TRAP Pierre

Le tungstène (W) est un métal considéré comme critique pour l’économie française et européenne, du fait de son importance industrielle et de sa production majoritairement concentrée en Chine. Le projet vise à l’étude spécifique et comparative des gneiss à silicates calciques (GASC) minéralisés en scheelite. Il s’agit d’améliorer la compréhension de la genèse d’un type particulier de gisement de W, dit stratiforme en ciblant notamment l’impact de la déformation tardi-orogénique. Ce type de gisement était par le passé considéré comme lié à l’anatexie de roches métamorphiques dans un contexte de collision continentale. Des travaux récents focalisés sur la localité type du Felbertal (Autriche), actuellement encore exploitée, suggère plutôt qu’il correspond à des skarns déformés et métamorphisés. Dans ce contexte, l’impact de ces phénomènes pour une éventuelle reconcentration des minéralisations doit être investigué. Dans le massif du Tanneron, des GASC constituent le gisement de La Favière qui fut exploité de 1982 à 1986 avec l’extraction de 150000t à 1wt% de WO3. Dans le massif de la Montagne Noire, à l’est de la zone axiale, le prospect de la Gineste, étudié par le BRGM au cours des années 80, est défini par la présence d’un niveau de GASC de 7 m de puissance à teneur moyenne de 0,20 % WO3 reconnu sur environ 1 km d’extension NE-SO. Pour ces deux gisements, les données structurales, pétrologiques et géochronologiques sont encore trop limitées et il n’est pas possible de caler la cristallisation de la scheelite dans l’évolution tectono-métamorphique varisque, limitant fortement la compréhension de la genèse de ces gisements et une confrontation avec cette nouvelle vision sur la formation des GASC. Les massifs du Tanneron et de la Montagne Noire ont connus un épisode majeur de structuration à la fin de l’histoire orogénique varisque, vers 325-295 Ma, dans un contexte tectonique complexe et encore très discuté. La déformation de la croûte y était très hétérogène et partitionnée dans l’espace. Dans ce contexte, le projet vise d’abord à répondre aux interrogations suivantes: Quel(s) est(sont) l’(les)âge(s) de(s) GASC dans ces deux massifs ? Quels sont les caractères de la déformation polyphasée ductile et cassante les affectant ? Quelle serait le niveau éventuel de remobilisation des minéralisations en conséquence du métamorphisme et de la déformation ? Les zones de déformations localisant la circulation de fluides, ceux-ci ont-ils un impact sur la minéralisation et quelle(s) serai(en)t leur(s) nature(s) ? In fine, le projet vise à éclairer les interrelations entre déformation, métamorphisme et minéralisations. Une analyse structurale multi-échelle précisera les fabriques et permettra la reconnaissance des différents stades de déformations et paragenèses métamorphiques associées. L’étude intégrée et précise des caractères structuraux et microstructuraux, pétrologiques et géochronologiques permettra de proposer une évolution P-T-t-X des W-GASC. Combinées aux températures d’échange isotopique déduites des microstructures du quartz, de l’EBSD et de la thermométrie Ti-in-Ms, nous déterminerons les valeurs dD et d18O du fluide aqueux présent lors de la déformation. Ainsi, en combinant ces différentes approches, nous pourrons apporter de nouvelles contraintes sur la formation des minéralisations à W de type GASC, lesquelles présentent un potentiel certain au sein de la chaine varisque ouest européenne.

Rôle de l’immiscibilité liquide-liquide dans les enrichissements en terres rares des liquides granitiques– VAN LICHTERVELDE Marieke

Les granites et pegmatites à métaux rares se divisent en deux catégories : les peralumineux, excédentaires en aluminium par rapport aux alcalins, sont enrichis en lithium, cesium et tantale (type LCT) et les peralcalins, enrichis en alcalins par rapport à Al, sont source de niobium, éléments de terres rares (ETR) et fluor (type NYF). Il existe toutefois des granites pegmatitiques peralumineux dont les concentrations en ETR sont celles que l’on rencontre traditionnellement dans les roches peralcalines, à savoir plusieurs centaines à milliers de ppm. Dans l’exemple des granites pegmatitiques à monazite de la Province de Grenville au Canada, ces minéralisations ne peuvent s’expliquer par simple cristallisation fractionnée ni par une origine hydrothermale (Turlin et al. 2017). Nos précédents travaux expérimentaux (Van Lichtervelde et al., en review) montrent que des concentrations en ETR élevées peuvent être atteintes dans des liquides peralumineux extrêmement enrichis en éléments fluants (P-F-Li-Cl), par immiscibilité liquide-liquide à partir de liquides granitiques évolués. Nous voudrions donc savoir si un modèle d’immiscibilité liquide-liquide est valable dans le cas des granites peralumineux à monazite de la Province de Grenville, à partir d’expériences en cristallisation reproduisant les conditions de formation de ces granites.

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CESSUR – Appel d’offres 2022